Le paysage syn­di­cal agri­cole français s’est vu trans­for­mé par les élec­tions 2025 des cham­bres d’agriculture. Pour la pre­mière fois, une véri­ta­ble tri­par­ti­tion émerge. Cette sit­u­a­tion témoigne claire­ment d’une poussée d’un vote Coor­di­na­tion rurale, d’une légère pro­gres­sion de la Con­fédéra­tion paysanne et d’un affaib­lisse­ment his­torique de l’alliance FNSEA-JA.

Pour­tant, six mois après le scrutin où elle n’a obtenu que 47 % des voix, la FNSEA con­trôle encore 77 % des cham­bres. Elle con­tin­ue ain­si à se posi­tion­ner comme le prin­ci­pal porte-voix du monde agri­cole, comme observé à l’occasion du pas­sage à l’Assemblée Nationale de la propo­si­tion de loi visant à lever les con­traintes à l’exercice du méti­er d’agriculteur.

Le Col­lec­tif Nour­rir pub­lie aujourd’hui une note qui explore en pro­fondeur le mécan­isme des attri­bu­tions de sièges au sein des cham­bres d’agriculture. Cette analyse lève le voile sur un sys­tème élec­toral biaisé dont le déséquili­bre prof­ite à l’hégémonie de ce syn­di­cat sur le con­trôle des cham­bres, sans refléter réelle­ment le vote des agriculteur·rices. Pour­tant, une évo­lu­tion de ce sys­tème est pos­si­ble, et aurait par ailleurs des réper­cus­sions poli­tiques et finan­cières majeures pour l’ensemble des syn­di­cats agricoles.

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Comment fonctionnent les élections de chambres d’agriculture ?

Les cham­bres départe­men­tales d’agriculture sont con­sti­tuées de 10 col­lèges ou sous-col­lèges dif­férents béné­fi­ciant d’un nom­bre d’élus fixe et dis­posant cha­cun de car­ac­téris­tiques pro­pres. Les agriculteur·rices votent au sein du col­lège 1 « Chef d’exploitation et assim­ilé », qui regroupe à lui seul 55 % des sièges d’élu·es con­sti­tu­ant l’assemblée d’une cham­bre. Les agriculteur·rices ont donc en théorie la main sur l’orientation poli­tique des chambres.

Une prime au gagnant qui fausse le jeu 

Aujourd’hui, le syn­di­cat arrivé en tête du col­lège 1 obtient automa­tique­ment la moitié des sièges d’élu·es disponibles, quelle que soit la marge de son avance. Une sit­u­a­tion héritée d’un temps où il n’y avait qua­si­ment pas d’alternative à l’alliance FNSEA-JA. Déjà ques­tionnable depuis l’arrivée de nou­veaux syn­di­cats représen­tat­ifs, elle pose d’autant plus prob­lème dans le cas d’une élec­tion ne faisant pas ressor­tir un clair vain­queur. En 2025, dans de nom­breux départe­ments, l’al­liance FNSEA-JA a ain­si large­ment béné­fi­cié de ce sys­tème. En Isère par exem­ple, alors que les trois listes syn­di­cales ont toutes reçu entre 28 % et 39 % des votes, l’alliance FNSEA-JA a récupéré près de 70 % des sièges d’élu·es.  

Une autre carte du pouvoir agricole est possible

Si l’on appli­quait un sys­tème d’attribution pro­por­tion­nel, comme c’est le cas dans les deux autres cham­bres con­sulaires (cham­bres de com­merce et d’in­dus­trie, cham­bres de métiers et de l’ar­ti­sanat), plus de 260 sièges d’élu·es seraient redis­tribués dans les Cham­bres d’agriculture partout en France. La note pro­pose à ce titre une pro­jec­tion pro­por­tion­nelle, cham­bre par cham­bre et sous forme de carte de la France, des résul­tats des dernières élec­tions de cham­bres d’agriculture.

Cette pro­jec­tion met en lumière une représen­ta­tion syn­di­cale toute autre, mar­quée par une perte de con­trôle claire de l’alliance FNSEA-JA. Ce scé­nario révèle en effet une représen­ta­tion des agricul­teurs et agricul­tri­ces français·es plus diver­si­fiée, à l’opposé des résul­tats que laisse voir le mode de scrutin actuel. Dans de nom­breux départe­ments, aucun syn­di­cat ne détiendrait seul la majorité, ouvrant la voie à des gou­ver­nances partagées, fondées sur la négo­ci­a­tion plutôt que sur l’hégémonie. Une évo­lu­tion du mode de scrutin, auquel s’oppose forte­ment le syn­di­cat dit majori­taire, aurait égale­ment des con­séquences majeures sur la répar­ti­tion des financements.

La note doc­u­mente et pose ain­si un ques­tion­nement plus large. Pourquoi cer­tains col­lèges élec­toraux restent-ils ver­rouil­lés au prof­it d’un seul camp ? Quelles seraient les con­séquences d’un mode élec­toral plus représen­tatif du choix des agriculteur·rices, notam­ment sur la san­té finan­cière des syndicats ?

Penser autrement les chambres d’agriculture

Conçue comme un doc­u­ment d’analyse, cette note propose :

  • Une analyse détail­lée du fonc­tion­nement des élec­tions de cham­bres d’a­gri­cul­ture et de leur inci­dence sur les résul­tats 2025
  • Une visu­al­i­sa­tion claire des écarts entre voix exprimées et sièges attribués, avec une com­para­i­son entre le scé­nario actuel et un scé­nario proportionnel
  • Un nou­veau regard sur les con­séquences et freins poli­tiques et financiers à l’évolution de ce système

 

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Pour en savoir plus sur le fonc­tion­nement des élec­tions de cham­bres d’agriculture : lire notre note tech­nique sur le sujet (2024)